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cherchèrent jamais qu’à se procurer les objets qu’ils connaissaient, et dont ils avaient besoin ; ils regardaient toutes les autres choses avec une indifférence parfaite. Notre figure, notre accoutrement et nos manières, si peu semblables aux leurs, la forme et la grandeur extraordinaire de nos vaisseaux ne parurent ni exciter leur admiration, ni même fixer leur attention.

» On doit peut-être attribuer cette insouciance à leur paresse, qui semble fort grande. D’un autre côté, ils paraissent susceptibles, à certains égards des passions tendres, car ils aiment extrêmement la musique : celle qu’ils font est grave et sérieuse, mais touchante. Ils gardent la mesure la plus exacte dans leurs chants, auxquels un grand nombre d’hommes prennent part, ainsi que je l’ai déjà dit en parlant de ceux qu’ils exécutèrent dans leurs pirogues afin de nous amuser. Leurs airs ont ordinairement de la lenteur et de la gravité ; mais leur musique n’est pas resserrée dans des bornes aussi étroites que celle de la plupart des nations sauvages ; les variations en sont très nombreuses et très-expressives, et elles offrent des cadences et une mélodie d’un effet agréable. Outre leurs concerts en règle, un seul homme chante souvent des airs détachés qui sont aussi sur un ton grave ; et pour marquer la mesure, il frappe sa main contre sa cuisse. Leur musique a quelquefois un autre caractère ; car nous entendîmes à diverses reprises des