rens, et il fallut en satisfaire un si grand nombre, que je ne tardai pas à vider mes poches. Quand ils s’aperçurent que je n’avais plus rien à leur offrir, leurs importunités cessèrent : ils nous permirent de couper de l’herbe partout, et d’en embarquer autant que nous le voulûmes.
» Je dois observer que, de toutes les nations ou tribus peu civilisées parmi lesquelles j’ai relâché dans le cours de mes voyages, les habitans de cette baie m’ont paru avoir les idées les plus précises et les plus rigoureuses du droit de propriété sur toutes les productions de leur pays. Ils voulurent d’abord faire payer le bois et l’eau qu’embarquèrent mes gens ; et si je m’étais trouvé à l’endroit où ils formèrent leurs réclamations, je n’aurais pas manqué de souscrire à leurs demandes : mes travailleurs ne pensèrent pas ainsi, car ils ne s’embarrassèrent pas de leurs plaintes ; et les naturels, voyant que nous étions résolus à ne pas les écouter, cessèrent enfin de nous parler de cette affaire ; mais ils se firent un mérite de leur condescendance, et ils nous rappelèrent souvent ensuite qu’ils nous avaient donné du bois et de l’eau par amitié.
» J’eus occasion, dans cette course, d’examiner plus en détail la construction des cabanes, les meubles, les ustensiles, et les particularités les plus frappantes des usages et de la manière de vivre des habitans. Je décrirai tout à l’heure les coutumes et les mœurs de cette peuplade, et j’aurai soin d’ajouter à mes