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je les reconduisis dans l’île : bientôt après on me ramena le chevreau et un des dindons. Ils promirent de nous livrer l’autre le lendemain ; comptant sur leur parole, je relâchai les pirogues, et je rendis la liberté aux chefs.

» Quand les chefs nous eurent quittés, nous fîmes une promenade, O-maï et moi, afin d’observer les repas des naturels ; car c’était un des momens de la journée où ils mangent. Je trouvai qu’ils avaient en général de bien petites rations. Il ne faut pas s’en étonner, puisqu’ils nous avaient vendu la plupart des ignames et des autres provisions qu’ils avaient apportées, et qu’ils ne pensaient jamais à retourner dans leurs bourgades tant qu’ils rencontraient quelque espèce de subsistance autour de notre camp. Nous étions établis sur une pointe de terre en friche, et à proprement parler, aucun des insulaires ne résidait à un mille de nous ; il se trouvait une foule si nombreuse d’étrangers dans les cantons où commencent les cultures, que nous nous attendions à y voir les maisons remplies de monde. Nous nous trompions : les familles qui y résidaient n’avaient pas un seul hôte. Tous les étrangers vivaient sous des hangars mal construits, ou sous des arbres et des buissons. Nous remarquâmes qu’on avait dépouillé les cocotiers de leurs branches afin de bâtir des huttes pour les chefs.

» Nous rencontrâmes durant cette promenade une demi-douzaine de femmes qui sou-