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l’aspect des campagnes aux environs de Sainte-Croix, on en conclurait que Ténériffe est stérile, et qu’elle ne peut pas même fournir à la subsistance de ses habitans. Mais la quantité considérable des provisions que l’on nous vendit nous prouva que les habitans ne consomment point à beaucoup près toutes les productions de leur sol. Outre le vin, on y achète des bœufs à un prix modéré. Ces bœufs sont petits et osseux : la viande en est maigre. Je fis la sottise d’acheter de jeunes bœufs en vie, et je les payai très-cher. Les cochons, les moutons, les chèvres et la volaille y sont à bon marché ; on trouve des fruits en grande abondance. Nous y mangeâmes des raisins, des figues, des poires, des mûres et des melons musqués. L’île produit beaucoup d’autres fruits qui n’étaient pas de saison. Les citrouilles, les ognons et les patates y sont d’une qualité excellente, et je n’en ai jamais rencontré qui se gardent mieux à la mer.

» Les habitans prennent peu de poisson sur leur côte ; mais ils font une pêche considérable sur la côte de Barbarie, et ils en vendent le produit à bon compte. Je pense que les vaisseaux qui entreprennent de longs voyages doivent relâcher à Ténériffe plutôt qu’à Madère ; quoique, selon moi, le vin de cette dernière île soit aussi supérieur à celui de la première que la bière forte l’est à la petite bière. Mais le prix compense cette différence[1].

  1. On faisait autrefois à Ténériffe une grande quantité de vin sec de Canarie, que les Français appellent vin de Mal-