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Quelques naturalistes se sont trop attachés à découvrir les espèces individuelles, sans examiner l’enchaînement général des productions de la nature. C’est à cette cause qu’il faut attribuer les erreurs nombreuses qu’on a commises dans la sous-division ou dans la combinaison des genres ; d’autres, en fixant sans cesse leur attention sur l’ensemble de la nature, ont oublié de descendre aux détails de la classification qu’exigeait cependant l’état imparfait de la science : c’est en tenant un juste milieu entre ces deux extrémités que l’illustre Linné a dressé, pour classer toutes les productions de la nature, des méthodes qui attestent son extrême sagacité, ont rendu son nom si célèbre, et le feront reconnaître par la postérité pour le créateur de la science. C’est pour avoir commis la première faute que les naturalistes qui n’ont jamais voyagé chargent leurs livres d’énumérations de variétés, au lieu d’espèces ; d’un autre côté, l’éloquent Buffon, occupé du soin de contempler son sujet dans toute sa grandeur, commet quelquefois des négligences dans les détails ; les siècles futurs perfectionneront l’histoire naturelle, en réunissant ce que ces deux manières de la traiter offrent de bon. Quelque grande que soit la perte de Linné, elle ne sera pas extrêmement sentie tant qu’il nous restera des botanistes aussi éclairés que M. Banks et le docteur Solander, et des zoologistes doués d’autant de sagacité que Buffon et le professeur Pallas.