il fallait manger des viandes salées, préparées depuis trois ans, et dont les sucs étaient entièrement détruits, ou se contenter de biscuit, si l’estomac ne pouvait pas digérer ces substances grossières. Comme tout le monde désirait la terre, nous consultions avec empressement les livres qui traitaient du voyage de Mendaña ; les termes vagues qui expriment la distance des Marquésas au Pérou donnant une libre carrière à nos conjectures, chaque jour produisait de nouveaux calculs sur leur longitude. Nous passâmes cinq jours consécutifs sur les différentes positions que les géographes ont données à ces îles. Durant cette route, nous jouîmes de quelques soirées charmantes ; et le 3 avril, au coucher du soleil, nous observâmes en particulier que le ciel et les nuages étaient teints de différentes couleurs vertes. Frézier avait observé avant nous cette couleur, qui n’est point extraordinaire, si l’air est chargé de vapeurs, comme cela arrive souvent entre les tropiques. Le même jour nous prîmes un petit suceur qui s’était attaché à un poisson volant avec lequel nous avions amorcé un hameçon ; preuve que ces animaux ne sont pas toujours collés aux requins ; nous aperçûmes aussi un gros poisson de l’espèce des raies, appelé diable de mer par quelques auteurs ; il ressemblait parfaitement à un autre qui avait frappé nos regards dans la mer Atlantique, le 1er. de septembre 1772. Le nombre des hirondelles de mer, des pailles-en-cul et des frégates, augmen-
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