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nombre de femmes du peuple, retenues d’avance par nos matelots, restèrent à bord au coucher du soleil, après le départ de leurs compatriotes ; nous avions vu des exemples de prostitution parmi les femmes d’Oaïtépéha ; mais quelles que fussent leurs faiblesses pendant le jour, elles ne s’avisaient point de passer la nuit sur le vaisseau. Celles de Matavaï connaissaient mieux le caractère des matelots anglais ; elles savaient bien qu’en se fiant à eux, elles emporteraient les grains de verroterie, les clous, les haches, et même les chemises de leurs amans. La soirée fut consacrée à la joie et au plaisir aussi complètement que si on avait été à Spithead. Avant qu’il fût parfaitement nuit, les femmes s’assemblèrent sur le gaillard d’avant, et l’une d’elles jouant de la flûte avec son nez, les autres exécutèrent toutes sortes de danses du pays, la plupart fort indécentes. Comme la simplicité de leur éducation et de leur vêtement donne un caractère d’innocence à des actions qui sont blâmables en Europe, on ne peut pas les accuser de cette licence effrénée qu’on reproche aux femmes publiques des nations policées. Enfin elles se retirèrent sous les ponts, et celles dont les amans purent les régaler de porc frais soupèrent sans se gêner, quoiqu’elles eussent refusé auparavant de manger en présence de leurs compatriotes. La quantité de porc qu’elles consommaient est étonnante, et leur voracité prouvait bien qu’elles mangent rarement dans leur famille de