Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 24.djvu/327

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

réprima cette habitude, quelque empire qu’elle eût.

» Enfin le 11, au point du jour, nous vîmes la terre ; à environ huit lieues de distance, sans apercevoir dans l’espace intermédiaire une seule île sur laquelle les canots eussent pu nous conduire, pour nous transporter ensuite sur la terre, en cas que le vaisseau fût mis en pièces. Le vent tomba pourtant par degrés, et nous eûmes calme tout plat d’assez bonne heure dans la matinée ; s’il avait été fort, notre bâtiment aurait infailliblement péri. Nous attendions la marée haute à onze heures du matin ; nous portâmes les ancres en dehors, et nous fîmes tous les autres préparatifs pour tâcher de nouveau de remettre le vaisseau à flot ; nous ressentîmes une douleur, et une surprise qu’il n’est pas possible d’exprimer, lorsque nous vîmes qu’il ne flottait pas de plus d’un pied et demi, quoique nous l’eussions allégé de près de cinquante tonneaux, car la marée du jour n’était pas parvenue à une aussi grande hauteur que celle de la nuit : nous nous mîmes à l’alléger encore davantage, et nous jetâmes à la mer tout ce qui ne nous était point absolument nécessaire. Jusqu’ici le vaisseau n’avait pas fait beaucoup d’eau : mais à mesure que la marée baissait, l’eau y entrait avec tant de rapidité, que deux pompes travaillant continuellement pouvaient à peine nous empêcher de couler à fond : à deux heures, deux ou trois voies d’eau s’ouvrirent à tribord, et la pinasse,