sont d’une douceur et d’une mélodie remarquables, et ont un accent agréable et tendre. La mesure en est lente, et la cadence triste. Toute cette musique, autant que nous en pûmes juger sans avoir une grande connaissance de l’art, nous parut exécutée avec plus de goût qu’on n’a lieu de l’attendre de sauvages pauvres et errans dans un pays à moitié désert. Nous crûmes que leurs airs étaient à plusieurs parties ; du moins est-il certain qu’ils étaient chantés par plusieurs voix ensemble.
» Ils ont des instrumens sonores, mais on peut à peine leur donner le nom d’instrumens de musique : l’un est la coquille appelée la trompette de Triton, avec laquelle ils font un bruit qui n’est pas différent de celui que nos bergers tirent de la corne d’un bœuf. L’autre est une petite flûte de bois, ressemblant à une quille d’enfant, mais beaucoup plus petite, et aussi peu harmonieuse qu’un petit sifflet. Ils ne paraissent pas regarder ces instrumens comme fort propres à la musique ; car nous ne les avons jamais entendus y joindre leurs voix ni en tirer des sons mesurés qui eussent la moindre ressemblance avec un air.
» Après ce que j’ai déjà dit sur l’usage où sont ces insulaires de manger de la chair humaine, j’ajouterai seulement que, dans presque toutes les anses où nous débarquâmes, nous avons trouvé des os humains encore couverts de chair, près des endroits où l’on avait fait du feu, et que, parmi les têtes qui furent