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bâtiment. Lorsqu’elles s’étaient approchées à environ une encablure du vaisseau, elles avaient coutume de s’arrêter, et les chefs, se levant de leur siége, endossaient un vêtement qui semblait destiné pour cette occasion, et qui était ordinairement une peau de chien. Ils prenaient en main leur bâton de distinction ou une arme, et ils montraient aux autres habitans ce qu’ils devaient faire. Quand ils se trouvaient à une trop grande distance pour nous atteindre avec la lance ou avec une pierre, ils croyaient aussi qu’ils n’étaient pas à la portée de nos armes ; alors ils nous adressaient leur défi, dont les mots étaient presque toujours les mêmes, heromaï, heromaï harré outa ê patou-patou oghi : « Venez à nous, venez à terre, et nous vous tuerons tous avec nos patou-patous. » Pendant qu’ils proféraient ces menaces, ils s’approchaient insensiblement jusqu’à ce qu’ils fussent tout près du vaisseau. Ils parlaient par intervalles d’un ton tranquille, et répondaient à toutes les questions que nous leur faisions ; d’autres fois ils renouvelaient leur défi et leurs menaces, jusqu’à ce qu’enfin encouragés par la timidité qu’ils nous supposaient, ils commençaient leur chanson et leur danse de guerre ; c’était le prélude de l’attaque, qui durait quelquefois si long-temps, que, pour la faire finir, nous étions obligés de tirer quelques coups de fusil. Quelquefois ils se retiraient après nous avoir jeté quelques pierres à bord, comme s’ils eussent été contens de nous avoir fait une