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le plus raboteux du maillet : elles deviennent d’une épaisseur égale à nos draps d’Angleterre, et plus douces et plus unies que ces draps, après qu’elles ont un peu servi, quoiqu’en sortant de dessous le maillet elles paraissent avoir été empesées.

» Cette étoffe se déchire quelquefois lorsqu’on la bat ; mais on la raccommode aisément en y joignant un morceau avec une colle composée de la racine du pi ; et cette opération se fait avec tant d’adresse qu’on ne s’en aperçoit pas. Les femmes s’occupent aussi à enlever les taches, comme nos dames à faire de la broderie ou des nœuds.

» La fraîcheur et la douceur sont les principales qualités de cette étoffe ; son défaut est d’être spongieuse comme le papier, et de se déchirer presque aussi facilement.

» Les Taïtiens la teignent surtout en rouge et en jaune. Leur rouge est très-beau, et j’oserai dire plus brillant et plus fin qu’aucun de ceux que nous avons en Europe. Notre véritable écarlate est celui qui en approche davantage ; et le peintre d’histoire naturelle qu’avait amené M. Banks ne put l’imiter qu’imparfaitement, en mêlant ensemble du vermillon et du carmin. Le jaune est encore très-brillant ; mais nous en avons d’aussi beau. Leur rouge est composé des sucs de deux végétaux mêlés ensemble, et qui, séparés, n’ont aucune tendance à cette couleur : l’un est une espèce de figuier appelé matté ; et l’autre, le sébestier, ou étou :