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des feuilles d’une plante qu’ils appellent ava. Cette plante n’était pas dans sa maturité lorsque nous étions à Taïti, de manière que nous n’avons vu aucun exemple de ses effets ; et puisqu’ils regardent l’ivrognerie comme une chose honteuse, ils nous en auraient probablement caché toutes les circonstances, s’ils s’y étaient livrés pendant notre séjour. Ce vice est presque particulier aux chefs et aux personnes d’un rang distingué, qui se disputent à qui boira le plus grand nombre de coups, et chaque coup est d’environ une pinte. Ils ont grand soin que les femmes ne goûtent point de ce jus enivrant.

» Ils n’ont point de tables ; mais leurs repas se font avec beaucoup de propreté ; leurs mets sont trop simples et en trop petit nombre pour qu’il y règne de l’ostentation : ils mangent ordinairement seuls ; cependant, lorsqu’un étranger leur rend visite, ils l’admettent quelquefois à manger avec eux. Je vais donner une description particulière du repas d’un de leurs principaux personnages.

» Il s’assied sous un arbre voisin ou au côté de sa maison qui est à l’ombre, et on étend proprement sur la terre, en forme de nappe, une grande quantité de feuilles d’arbre à pain ou de bananier. On met près de lui un panier qui contient sa provision, et deux coques de cocos, l’une remplie d’eau douce ; la chair ou le poisson sont tout apprêtés et enveloppés de feuilles. Les gens de sa suite, qui ne sont pas