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ont pourtant d’autre sauce que l’eau salée ; ils en font une seconde avec l’amande du coco, qu’ils laissent fermenter jusqu’à ce qu’elle se dissolve en pâte assez ressemblante à du beurre, et qu’ils pétrissent ensuite avec de l’eau salée. La saveur de cette sauce est très-forte, et nous parut très-désagréable lorsque nous en goûtâmes pour la première fois ; quelques-uns de nos gens cependant ne la trouvèrent pas dans la suite si mauvaise, et même ils la préféraient à celle que nous employions dans nos repas, surtout quand elle était mêlée avec le poisson. Les Taïtiens semblaient la regarder comme une friandise ; ils ne s’en servaient pas dans leurs repas ordinaires, soit parce qu’ils imaginent que c’est prodiguer mal à propos les cocos, ou que, lors de notre séjour dans l’île, elles ne fussent pas assez mûres pour cela.

» En général, l’eau et le jus de coco forment toute leur boisson. Ils ignorent heureusement l’art de faire par la fermentation des liqueurs enivrantes ; ils ne mâchent aucun narcotique, comme les habitans de quelques autres pays font de l’opium, du bétel ou du tabac. Quelques-uns des insulaires burent librement de nos liqueurs fortes et s’enivrèrent de temps en temps ; mais ceux qui tombèrent dans l’ivresse étaient si peu disposés à réitérer la même débauche, que par la suite ils ne voulurent jamais avaler une goutte de la boisson qui les avait mis dans cet état. Nous avons cependant appris qu’ils s’enivrent quelquefois en buvant un suc expri-