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décrit ; il s’adoucit alors et devient assez semblable à une pomme-de-terre bouillie, sans être pourtant aussi farineux qu’une pomme-de-terre de la meilleure espèce. Ils apprêtent le fruit à pain de trois manières ; ils y mettent quelquefois de l’eau ou du lait de cocos, et le réduisent en pâte avec un caillou ; d’autres fois ils le mêlent avec des bananes mûres, ou ils en font une pâte aigrelette qu’ils appellent mahié.

» Le mahié supplée, au fruit à pain lorsque la saison ne leur permet pas d’en avoir du frais : voici comment ils le font.

» Ils cueillent les fruits avant qu’ils soient parfaitement mûrs, et, après les avoir mis en tas, ils les couvrent exactement avec des feuilles : dans cet état, ils subissent une fermentation, et deviennent d’une douceur désagréable ; ils en ôtent le trognon, et jettent ensuite le reste dans un trou qui est creusé pour cet effet ordinairement dans les habitations : ce creux est garni proprement d’herbe au fond et sur les côtés ; ils couvrent le tout de feuilles et de grosses pierres ; il éprouve alors une seconde fermentation, prend un goût aigrelet, et se conserve ainsi pendant plusieurs mois. Ils le tirent du trou à mesure qu’ils en ont besoin ; et après l’avoir mis en boule et l’avoir enveloppé de feuilles, ils le font cuire dans leur four ; il se garde cinq ou six semaines ainsi apprêté. Les naturels du pays le mangent froid et chaud, et c’est communément un des mets de tous leurs repas ; il était pour nous d’un