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chasser sur ses ancres par le premier coup de vent.

Les Espagnols se voyaient forcés de renoncer au débarquement avec d’autant plus de regrets que la flotte commençait à manquer d’eau ; ils étaient déterminés à retourner tristement à bord, lorsque François Ponce, jeune matelot plein d’audace et de feu, bravant le danger, et se sacrifiant généreusement pour l’honneur de l’expédition et le salut de ses compagnons, se déshabille, se jette à la mer, et nage vers les rochers. Les insulaires, émus par cet acte de courage, se mettent à l’eau pour venir à son secours, le prennent dans leurs bras, le baisent sur le front, enfin le comblent de caresses que sa reconnaissance leur prodigue en retour. Plusieurs Espagnols, que son exemple anime, s’élancent dans la mer, et, franchissant les lames, sont reçus par les insulaires avec les mêmes marques de sensibilité et d’affection.

Ces braves sauvages étaient tous armés ; les uns portaient des lances de vingt-cinq à trente palmes de longueur, d’autres des espèces de sabres, et quelques-uns de fortes masses. Toutes ces armes étaient de bois. Ces insulaires n’avaient aucun vêtement. Leur peau était basanée, leur corps bien proportionné, leur taille élevée. Leurs habitations étaient éparses sans ordre sur le bord de la mer, au milieu des cocotiers, des bananiers, et des autres arbres qui abondent dans l’île, et dont les fruits, avec le produit de