Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/388

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pes du christianisme, que nous n’avons pas plus de droit sur notre propre vie que sur la vie des autres ; et le suicide étant regardé comme une espèce de meurtre très-criminel, tout homme sera coupable d’exposer sa propre vie pour un motif qui ne lui permettrait pas d’attenter à celle d’un autre. Si l’on peut donc sans crime sacrifier la vie des hommes dans des entreprises qui n’ont pour but que de satisfaire des besoins artificiels, ou d’acquérir de nouvelles connaissances, il n’y en aura pas non plus à employer la force pour descendre sur un pays nouvellement découvert, dans la vue d’en examiner les productions. Si ce principe n’était pas reçu, toute profession où les hommes exposent leur vie pour des avantages de même genre ne devrait pas être permise ; et quelle est la profession qui ne compromette pas la vie des hommes ? Examinons cette multitude infinie occupée aux arts, depuis le forgeron couvert de sueur devant un fourneau sans cesse embrasé, jusqu’à l’ouvrier sédentaire qui pâlit sur un métier, on verra partout la vie des hommes sacrifiée en partie aux besoins factices de la société. Dira-t-on que la société civile, à qui on fait ce sacrifice, est par-là même une combinaison contraire aux grands principes de la morale, qui sont la base de toute espèce de devoir ? Dira-t-on qu’il est contre la nature d’exercer les facultés qui sont les marques de distinction de notre nature même ? Que, l’homme étant doué de