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peu de distance de quelques autres îles qui doivent en tirer une partie de leur subsistance. Mais les Anglais apprirent qu’il n’y avait pas cinquante ans qu’il était encore peuplé. Tinian contenait plus de trente mille âmes lorsqu’une maladie épidémique en ayant emporté une grande partie, les Espagnols forcèrent le reste de passer dans l’île de Guam, qui avait souffert les mêmes pertes, et de s’y établir pour remplacer les morts ; mais, après cette transmigration, la plupart tombèrent dans une mortelle langueur, et périrent de chagrin d’avoir quitté leur patrie. Ce récit des prisonniers fut confirmé par la vue de plusieurs ruines, qui prouvaient assez que l’île avait été fort peuplée. Elles consistent presque toutes en deux rangs de piliers de figure pyramidale, qui ont pour base un carré, et qui sont entre eux à la distance d’environ six pieds. Chaque rang est séparé de l’autre par le double de cet espace. La base des piliers est de cinq pieds carrés, et leur hauteur de treize. Ils se terminent tous par un demi-globe à surface plate ; et toute la masse, c’est-à-dire les piliers et les demi-globes, est de sable et de pierre, cimentés ensemble et revêtus de plâtre. Ces monumens, suivant le témoignage des prisonniers, sont les restes de plusieurs monastères indiens. Avec tous ces avantages, les vents frais qui soufflent continuellement dans l’île, et les pluies, quoique rares et courtes, dont elle est quelquefois abreuvée, y rendent l’air extrêmement sain.