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s’approchait de terre pour chercher un bon mouillage.

L’Espagnol, interrogé sur l’état de l’île, fit aux Anglais un récit qui surpassa même leurs désirs. Il leur apprit qu’elle était sans habitans, ce qu’ils regardèrent comme un bonheur dans leur situation ; qu’on y trouvait en abondance tous les vivres des pays les mieux cultivés ; que l’eau était excellente, et l’île même remplie de toutes sortes d’animaux d’un goût exquis ; que les bois produisaient naturellement des oranges, des limons, des citrons, des cocos, et le fruit à pain ; que les Espagnols profitaient de cette fertilité pour nourrir leur garnison de Guam ; qu’il était lui-même un des sergens de cette garnison, et qu’il était venu à Tinian avec vingt-deux Indiens pour tuer des bœufs qu’il devait charger dans une barque d’environ quinze tonneaux, qui était à l’ancre fort près de la côte.

Ce détail causa une joie fort vive aux Anglais. À la distance où ils étaient de la terre, ils voyaient paître de nombreux troupeaux. Le reste était confirmé par la beauté du pays, qui avait moins l’air d’une île déserte et inculte que d’une magnifique habitation. On y apercevait des bois charmans, avec de grandes et belles clairières, qu’on aurait prises pour un ouvrage de l’art. Le sergent espagnol ayant ajouté que les Indiens qu’il avait amenés étaient occupés à tuer des bœufs, cette circonstance fit sentir combien il était important de les retenir, dans