Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/328

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prenant guère moins de six mois, et le galion, se trouvant chargé de marchandises et de monde, est nécessairement exposé à manquer d’eau douce ; mais l’industrie des Espagnols y supplée. On sait que leur usage dans le grand Océan n’est pas de garder dans des futailles l’eau qu’ils ont à bord, mais dans des vaisseaux de terre, assez semblables aux grandes jarres dans lesquelles on met souvent l’huile en Europe. Le galion de Manille part chargé d’une provision d’eau beaucoup plus grande que celle qu’on pourrait loger entre les ponts ; et les jarres qui la contiennent sont suspendues de tous côtés aux haubans et aux étais. Cette méthode fait gagner beaucoup de place. Les jarres, d’ailleurs, sont plus maniables, plus faciles à ranger, et moins sujettes à couler que les futailles. Mais les plus abondantes provisions durant à peine trois mois, on n’a pas d’autre ressource que la pluie, qu’on trouve assez régulièrement entre les et de latitude septentrionale. Pour la recueillir, on prend à bord une grande quantité de nattes, qu’on place de biais aussitôt qu’il commence à pleuvoir. Ces nattes s’étendent d’un bout du vaisseau à l’autre. Le côté le plus bas est appuyé sur un large bambou fendu, qui sert de rigole pour conduire l’eau dans les jarres. Ce secours, quoique dépendant du hasard, n’a jamais manqué aux espagnols ; et souvent ils remplissent plusieurs fois leurs jarres dans le cours d’un voyage. Le scorbut leur cause plus d’embarras par ses ter-