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convaincu par le témoignage de tous ceux qui ont fait quelque séjour à Buénos-Ayres. Avec le suif et les cuirs on prend quelquefois aussi la langue des vaches qu’on a tuées. Le reste est abandonné à la pouriture, ou plutôt aux animaux voraces, surtout aux chiens sauvages, dont le nombre est prodigieux dans ces contrées. On les croit de race espagnole, et descendus de chiens domestiques qui n’ont pas eu d’empressement pour rejoindre leurs maîtres, dans un pays où l’abondance des charognes leur offrait sans cesse de quoi vivre. Ces chiens, qu’on rencontre quelquefois par milliers, n’empêchent pas la multiplication du bétail, parce qu’il ne va jamais qu’en hordes très-nombreuses, qu’ils n’osent attaquer. Ils se réduisent à faire leur proie des bêtes abandonnées par les chasseurs ou séparées du troupeau par quelque accident.

Les chevaux sauvages du pays, qui ne sont pas en moindre nombre que les taureaux et les vaches, tirent aussi leur origine d’Espagne. Quoiqu’en général ils soient excellens, leur multitude et la facilité de les prendre en rendent le prix si vil, que, dans un pays où l’argent est extrêmement bas et toutes les marchandises fort chères, les meilleures ne se vendent qu’un écu. On ignore jusqu’où ce bétail et ces chevaux s’étendent du coté du midi ; mais il y a lieu de croire qu’ils errent quelquefois jusqu’aux environs du détroit de Magellan ; et l’on ne doute point qu’avec le temps ils ne rem-