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sées. Mais si ce pays manque de bois, il abonde en pâturages. Le terrain en est sec, léger et graveleux, entremêlé de grands espaces stériles, et de touffes d’une herbe forte et longue, qui nourrit une immense quantité de bétail. Les Espagnols qui se sont établis à Buénos-Ayres, ayant apporté des vaches et des taureaux d’Europe, ces animaux s’y sont tellement multipliés, que personne ne daigne s’en attribuer la propriété. Ils sont devenus la proie commune des chasseurs, qui les tuent par milliers, pour en prendre uniquement les cuirs et le suif : cette chasse est singulière. Les habitans du pays, Espagnols ou Indiens, sont excellens cavaliers, et l’arme qu’ils emploient contre les vaches et les taureaux sauvages est une espèce de lance dont le fer a son tranchant perpendiculaire au bois. Ils montent à cheval pour leur chasse ; ils environnent la bête, et celui qui peut lui gagner la croupe se hâte de lui couper le jarret. Elle tombe ordinairement du premier coup. Les chasseurs la laissent dans le même lieu pour en suivre une autre. Quelquefois une seconde troupe de cavaliers marche sur leurs traces pour écorcher les bêtes tuées ; mais la plupart aiment mieux les laisser languir jusqu’au lendemain, dans l’idée que les douleurs qu’elles souffrent font crever les vaisseaux lymphatiques, et les rendent plus faciles à écorcher. L’auteur assure que les prêtres se sont déclarés contre ce cruel usage ; et si sa mémoire ne le trompe, dit-il, ils ont porté le