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un seul arbre, si ce n’est au bord des torrens, où la fraîcheur de l’eau entretient un peu de verdure. Ces déserts inspirent une véritable horreur. On n’y entend pas le chant d’un oiseau ; et pendant toute ma marche, je n’en vis qu’un de la grosseur d’un mouton, qui se perche sur les montagnes les plus arides, où il se nourrit des vers qui naissent dans cette vaste étendue de sables. Il est célèbre dans toutes les relations du Pérou sous le nom de condor. »

Le Gentil partit de Lima le 25 de janvier 1716 pour retourner à Pisco. Il y arriva le 3 de février pour être témoin d’un de ces désastres trop fréquens dans ces latitudes, d’un tremblement de terre qui renversa la ville, et dont il parle avec le saisissement et l’horreur que laisse un pareil spectacle dans un homme qui a partagé le péril. Le 10, à huit heures du soir, Pisco fut ébranlée. « Dans un instant, dit-il, je vis toutes les maisons renversées. Je voulus prendre la fuite ; mais la peur, qui donne quelquefois des ailes, m’avait lié les pieds. Je n’arrivai qu’avec peine sur la place de la ville, où tout le monde s’était retiré. Un quart d’heure après, la terre, ayant encore tremblé, s’ouvrit en quelques endroits, d’où il s’éleva des tourbillons de poussière avec un bruit effrayant. La plupart des habitans se retirèrent sur les montagnes voisines. Cette nuit fut un temps d’horreur et d’épouvante : la terre s’agitait à tous momens. Nous n’étions dans la ville que