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que deux, qu’il avait reconnus pour des Espagnols. Quelques gens de l’équipage, qui l’avaient aperçu, avaient tiré sur lui, et l’avaient poursuivi jusque dans les bois. Il s’était heureusement dérobé à leur fureur en grimpant sur un arbre où ils ne l’avaient pas découvert, et d’où il leur avait vu tuer plusieurs chèvres autour de lui. Il avoua qu’il n’aurait pas fait de difficulté de se livrer à des Français, s’il eût vu paraître quelqu’un de leurs vaisseaux ; mais qu’il avait mieux aimé s’exposer à mourir dans un lieu désert que de tomber entre les mains des Espagnols, qui n’auraient pas manqué de le tuer ou de le condamner aux mines, dans la crainte qu’il ne découvrît aux étrangers ce qui appartenait à la mer du Sud.

» Il était né à Largo, dans la province de Fife en Écosse. Dès son enfance il avait été élevé à la marine. Ayant été abandonné dans l’île par son capitaine à l’occasion de quelque démêlé qu’il avait eu avec lui, il avait pris la résolution d’y demeurer plutôt que de solliciter sa grâce par des soumissions qui l’auraient exposé à de nouveaux chagrins. Étant revenu néanmoins à des sentimens plus modérés, il avait souhaité de retourner au vaisseau ; mais le capitaine avait refusé de le recevoir. Il ajouta qu’il avait déjà touché à cette île dans un autre voyage, et qu’on y avait alors laissé deux hommes qui n’y avaient passé que six mois, jusqu’au retour de ceux qui les avaient abandonnés. Cet exemple l’avait soutenu contre les pre-