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où les Espagnols mettaient pied à terre, cent cinquante Indiens coururent à eux lances baissées. Une décharge de mousqueterie les fit fuir plus vite qu’ils n’étaient venus. Les Espagnols, descendus à terre, marchèrent en bon ordre vers un village, d’où l’on vit sortir une douzaine de vieillards portant des torches de bois résineux allumées ; c’est parmi eux un signe de paix. Ils firent entendre que les autres s’étaient enfuis dans un bois voisin, où ils avaient déjà caché leurs femmes et leurs enfans, près d’une lagune d’eau salée que la mer inonde pendant le flux.

Un Indien fit, en cet endroit, une action vraiment héroïque. À la vue des Espagnols, il sortit du bois, s’avança pour charger sur ses épaules un autre Indien blessé, et se hâta de fuir avec ce fardeau. Cet exemple de courage et d’amitié fut admiré des Espagnols. Cependant, les vieillards tremblans étaient prosternés aux pieds des Espagnols avec leurs torches et des rameaux verts. L’un d’eux, remarquable par sa taille et sa belle figure, présenta un de ces rameaux aux Espagnols. Torrès, qui les commandait, fit signe à celui des vieillards qui paraissait le plus dispos de conduire la troupe du côté où il y avait de l’eau, et en même temps lui présenta un habit de taffetas qu’il accepta avec des marques de contentement. Le vieillard se mit aussitôt en marche, et fut suivi de Torrès avec quinze hommes ; les autres restèrent dans le village. Les Espagnols éprouvèrent une