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ce qu’il n’avait pas d’armes. Je m’en retournai bien fâché de ce qui venait de se passer, et résolu de ne plus rien essayer contre les naturels du pays, qui se retirèrent avec leur compagnon blessé. Mon jeune homme, qui avait eu la joue percée d’un coup de lance, y sentit une grande douleur, et s’imagina que cette arme était empoisonnée. Je ne partageais pas son opinion, et j’eus raison, car il fut bientôt guéri.

» Parmi ces sauvages nous en remarquâmes un qui, par son extérieur et sa conduite, nous parut être leur chef ; il était jeune, d’une taille médiocre, vif, courageux, quoique moins bien fait que quelques-uns des autres. Il avait seul un cercle blanc dessiné autour des yeux, et une raie de la même couleur, depuis le haut du front jusqu’au bout du nez. Sa poitrine et une partie de ses bras étaient aussi peintes de blanc. Je ne sais si c’était un ornement ou une manière de se rendre plus terrible, comme certains Indiens d’Amérique. Quoi qu’il en soit, cette couleur blanche relevait sa difformité naturelle, et, en vérité, je n’ai jamais vu de sauvages si laids ni si affreux que ceux-ci. Je crois qu’ils sont de la même race que ceux que j’avais rencontrés à cinquante lieues au nord-est de cet endroit, quand je touchai à cette côte, dans mon voyage autour du monde. Ils ont de même le regard de travers, la peau noire, les cheveux crépus, la taille haute et élancée, les membres grêles ;