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science, c’est le chant. Les Lacédémoniens employaient la musique dans les combats, comme un instrument de victoire. Les Hébreux marchèrent à la conquête de la Palestine en chantant des vers sacrés, et les Luthériens se servent encore de cantiques pour le maintien et la propagation de la religion. Mais les frères Moraves ont établi des écoles de chant au Groënland, surtout pour les enfans et les jeunes filles. Les hommes, qui n’ont pas le temps d’assister aux instructions, apprennent l’Évangile par les hymnes qu’on leur chante dans les cabanes. Les enfans ont la mémoire facile, et les filles la voix douce. Le chant est tendre, mélodieux, distinct et posé, sans éclats, sans efforts. Les païens, dit Crantz, s’arrêtent souvent pour écouter le chant des femmes, et ils entendent en passant le catéchisme et la prédication. Quand les cantiques ont préparé les âmes à l’attendrissement, l’orateur profite de ces heureux instans où l’auditoire se laisse plus aisément persuader que convaincre. C’est alors qu’on écoute avec avidité les histoires tragiques et touchantes qui ont fait triompher la religion chrétienne chez tous les peuples simples, et disposés par les disgrâces de la nature ou les injures de la fortune à se passionner pour la doctrine la plus propre à consoler des malheureux. Le nom de Jésus souffrant, ami des pauvres, ennemi du riche, réparateur des maux, et victime de ses vertus, fait sur les Groënlandais cette impression d’enthousiasme qu’on retrouve