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Herrnhut en Allemagne envoyaient en présens d’étrennes aux chrétiens des missions. La musique et le chant attirèrent tous les païens d’alentour. L’église avait été illuminée, et les fenêtres étaient garnies de lampions faits de coquilles de moule, étranges en symétrie. La fête des Innocens fut célébrée avec des enfans, auxquels on donna une fête d’amour, c’est-à-dire une espèce d’agape ou de repas, qui fut composé de harengs saures. Jamais, dit l’auteur de ce récit, on ne vit tant de dévotion que dans ces fêtes ; jamais on ne vit couler tant de larmes que dans ce petit troupeau de sauvages, que l’Agneau du Seigneur avait rassemblé sous le pôle du nord, et qu’il avait baignés de ses sueurs et de son sang.

Crantz ne cesse de s’extasier du chant des Groënlandaises. « Elles l’emportent, dit-il, pour la douceur, l’harmonie et l’accord, sur certaines congrégations du herrnhutisme en Europe. On croirait de loin n’entendre qu’une seule voix, tant elles y mettent de justesse et de concert : elles n’ont qu’un défaut, c’est que, traînant lentement sur chaque syllabe, l’haleine leur manque souvent pour finir la phrase du chant ou du vers, quand elle est un peu longue. On remédie à ce défaut en soutenant le chœur avec des instrumens. L’orchestre est composé de deux ou trois violons, deux flûtes et quelques guitares. Les Groënlandais ont de l’aptitude pour la musique ; il y en a qui savent sonner de la trompette et du cor. »