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n’osèrent plus reparaître. Mais ceux des inconvertis qui avaient passé l’hiver et le printemps à Neu-Herrnhut restèrent tranquillement exposés au danger. La contagion sembla ne tomber que sur les baptisés ; et les coadjuteurs de la mission en furent les premières victimes. La joie qu’ils témoignaient à mourir chrétiens balança le regret de leur perte. Mais la mort des meilleurs pères de famille, augmentant le nombre des veuves et des orphelins, fit un vide difficile et long à réparer. Cette calamité fut suivie de l’espèce d’anarchie et de licence qu’entraînent toujours les fléaux publics dans une société nouvellement formée. Ainsi, dit Crantz, les missionnaires ne savaient trop s’ils devaient prendre pour sujet de leurs discours funèbres, dans la déroute générale des esprits ; ce texte de l’Écriture, Son âme plaisait au Seigneur ; il s’est hâté de l’enlever ; ou ces autres paroles : Le temps est venu que le jugement doit commencer dans la maison du Seigneur. Les prêtres préférèrent ce dernier texte, pour jeter, disaient-ils, de salutaires alarmes dans les cœurs ; et ils virent mourir leurs fidèles dans des sentimens de résignation. Ces pieux luthériens ne cessent d’admirer les textes heureux qu’ils trouvaient dans l’office du jour, quand ils avaient quelqu’un à enterrer. « Un jour ce furent ces paroles de saint Jean : Encore un peu de temps, et vous me verrez. Un autre jour, par la plus heureuse allusion, on tomba sur ce verset du cantique des canti-