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pendant le défaut d’être noire ; ce qui provient de ce que les Islandais, manquant de bons moulins à bras pour broyer ce blé, le font tellement sécher au feu, qu’il en est un peu brûlé. Ainsi la farine qu’il produit fait un pain noir comme le pain de seigle : en revanche, une tonne de farine fait un quart de profit de plus qu’une tonne de farine de Danemark.

On ne peut certainement pas dire qu’un pays soit bien peuplé lorsqu’il contient à peine la vingtième partie des habitans qu’il peut nourrir ; tel est l’état de l’Islande. La première cause de ce petit nombre d’babitans est attribuée d’abord à cette épidémie si terrible appelée la peste noire, qui désola tout le Nord pendant les années 1347, 1348 et 1349. Il périt tant de monde en Islande, qu’il n’y resta plus personne en état de rédiger une relation des effets de ce fléau meurtrier. Les annales islandaises, où tout ce qui est arrivé depuis que le pays est habité est exactement rapporté, n’en font aucune mention. On sait seulement, par une tradition orale, qu’il n’échappa de cette funeste contagion qu’un petit nombre d’habitans qui s’étaient sauvés dans les rochers. Tout le reste de cette nation périt sans secours et dans la plus affreuse misère. Cette même tradition apprend que tout le plat pays, où la peste exerçait le plus ses fureurs, était couvert d’un brouillard très-épais. Le Danemark, ayant été aussi dépeuplé dans le même temps, ne put y envoyer des colonies.