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nonceraient à cette vie errante, et qu’ils apprendraient à lire et à écrire ; mais il se vit obligé de les laisser aller à la mer, ou voir les sauvages toutes les fois qu’il leur en prenait envie. Quant à leur instruction, les commencemens lui réussirent tant qu’il eut un hameçon ou quelque outil à leur donner pour chaque lettre qu’ils apprenaient à connaître : mais ils furent bientôt rebutés de ce travail, et lui dirent qu’ils ne voyaient pas à quoi cela était bon de s’occuper toute une journée à regarder un papier, et crier A, B, C ; que le facteur et lui n’étaient que des paresseux, dont toute la vie se passait à tenir les yeux sur un livre et à gâter du papier avec une plume, tandis que les Groënlandaîs allaient pêcher des phoques et tuer des oiseaux : exercice de gens braves et laborieux, qui trouvaient du profit dans leur amusement. Il voulut leur faire entendre l’utilité de savoir lire et écrire, pour apprendre les pensées d’un ami absent, et pour connaître la volonté de Dieu dans son livre ; mais en convenant de ces avantages, ils trouvaient que l’art qui leur donnait à vivre était plus important, et que, quand on possédait bien cette science, on n’avait guère besoin d’autres connaissances.

Dans l’année 1723, Égède alla deux fois à la baie d’Amaralik ou Bals-Fiord, pour y voir un monument des anciennes colonies des Norwégiens. Il trouva dans un beau vallon les restes d’un édifice carré de pierre plate, environ de dix-huit pieds de long sur autant de largeur,