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vent contraire nous força de mouiller jusqu’au 12 du mois, que nous eûmes un temps favorable : il se soutint jusqu’au 4 juin , où nous aperçûmes le Statenhoek ou cap des États. Le pays était encore couvert de glace et de neige. La tempête et les glaces qui flottaient jusqu’à dix ou douze milles loin des côtes nous repoussaient toujours des rives du sud où nous voulions aborder. Quand le vent et la mer le permettaient, nous avancions à la voile le long des glaces, cherchant quelque passage pour gagner la terre ; mais elles étaient si fort pressées, et comme attachées le» unes contre les autres, que nous essayâmes, pour nous en éloigner, de tirer vers l’ouest en pleine mer. Tout nous rejetait contre ces écueils flottans que nous voulions éviter. Alors les maîtres de navire parlèrent de retourner à Bergen, comme s’il n’y eût point eu d’espérance d’aborder au Groënland. J’insistai contre ce parti dicté par le découragement.

» Cependant nous courûmes le plus grand danger. Un jour que nous étions entièrement renfermés dans les glaces, entre lesquelles il n’y avait pas un espace libre au delà de deux portées de fusil, l’alarme s’empara de l’équipage : elle redoubla bientôt quand on vit, par un signal que faisait la galiote qui nous avait toujours suivis depuis Bergen, qu’elle avait donné contre la glace qui l’avait percée. Cependant le dommage fut réparé ; mais le capitaine de notre navire vint dire à ma femme et à mes enfans