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ville l’entreprise du commerce et de la navigation du Groënland, avec des priviléges et sous la protection du gouvernement. Je retournai donc à Bergen. Tous les maîtres de navires et les pilotes qui avaient déjà fait le voyage du Groënland furent appelés à l’hôtel de ville afin d’y donner leur avis sur la nature du pays et l’espèce de commerce qu’on pouvait y faire. Mais ces gens de mer, craignant qu’on ne les forçât d’aller au Groënland, ou même d’y demeurer, répondirent que c’était le pays le plus mauvais de la terre, et le moins abordable par les dangers de la navigation. J’aurais passé pour un imposteur, si je n’avais justifié l’exposé du mémoire que j’avais présenté sur ce sujet par une lettre d’un de ces marins qui parlait assez avantageusement du commerce du Groënland. Mais cette démarche de la cour ne produisit aucun effet, non plus que les instances que je fis auprès d’un grand nombre de marchands de la ville pour seconder les avances de la protection du roi. Je passai tout l’hiver de 1720 sans espérance de secours ni de succès, exposé même aux railleries de bien des gens qui conseillaient à ma femme de me faire renoncer à mon entreprise. Mais, comme elle ne montrait pas moins de résolution que j’en avais, on nous dit nettement que nous étions des fous.

» Enfin, à force de sollicitations, j’obtins de quelques marchands qu’ils s’assembleraient avec moi pour délibérer sur les moyens de former une compagnie de commerce et une