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chrétien que le vôtre, surtout si le commerce pouvait fleurir par ce moyen. Le Groënland est, on n’en saurait douter, une partie de l’Amérique, et il ne doit pas être fort éloigné de Cuba et d’Hispaniola, où se trouve une grande abondance d’or. Mais personne n’est plus propre à aller chercher ces trésors que les navigateurs de Bergen. Le seul que je sache qui ait parcouru ces pays-là, c’est Louis Hennepin, missionnaire français, religieux récollet, qui a voyagé long-temps dans des pays qui ne peuvent être que le vieux Groënland, et qu’il nomme, dans sa carte, Nova Dania. »

On voit dans cette réponse que le bon évêque de Drontheim ne connaissait pas trop la situation du Groënland ; et son erreur paraît d’autant plus excusable que ce pays n’était pas encore découvert. Mais si Égède était encouragé par les prélats, il avait à combattre ses parens et ses amis, qui tous blâmaient sa résolution. Les prières et les pleurs de sa femme surtout lui firent tant d’impression, que, son projet lui paraissant une folie, il promit de rester dans sa cure. Il était tranquille, comme s’il eût été délivré d’une sorte de tentation ; « mais ce calme, dit-il, ne fut pas long. J’avais toujours dans l’esprit ces paroles de l’Évangile : « Celui qui aime père ou mère, femme, enfans, frères et sœurs plus que moi, n’est pas digne de moi. » Je ne pus réfléchir à cet oracle sans trembler ; j’y voyais ma condamnation, et mon âme en était dans un trouble continuel. Ma femme, à