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ressources pour vivre dans l’autre monde. Ces gens-là mettent la tête d’un chien sur le tombeau d’un enfant ; car l’âme d’un chien, disent-ils, sait trouver son chemin partout, et ne manquera pas de montrer au pauvre enfant, qui ne sait rien, le chemin des âmes. Mais depuis qu’on s’est aperçu que les effets qu’on mettait sur les tombeaux avaient été volés, sans crainte de la vengeance des spectres, ou des mânes des morts, quelques Groënlandais ont supprimé ces sortes de présens ou d’offrandes. Cependant ils ne se servent point de ces effets, mais ils les vendent à d’autres, qui n’ont aucun scrupule de ce marché.

Un enfant à la mamelle, qui ne peut encore digérer que le lait, ni trouver une nourrice, est enterré vif avec sa mère morte, ou peu de temps après elle, quand le père n’a pas le moyen de le conserver, ni le cœur de le voir souffrir plus long-temps. Quel tourment et quel horrible office pour un père d’enterrer ainsi son propre fils tout vivant. Mais il faut avoir eu un fils, il faut l’avoir perdu pour sentir cette affreuse situation. Une veuve qui sera déjà vieille, affligée et malade, sans enfans ni parens qui soient en état de la soutenir, est ensevelie dès son vivant, et l’on vous dit encore que c’est un acte de pitié que d’épargner ainsi à cette malheureuse créature la peine de languir dans un lit de douleur, d’où elle n’a point d’espérance de se relever ; que c’est soulager sa famille d’un fardeau trop onéreux à la