Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 20.djvu/361

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

font saigner pour ces sortes d’attaques, et quelquefois aussi par précaution, ce qui leur épargne bien des accidens et des maladies.

La plupart de ces maux leur viennent du genre de vie irrégulier que la nature avare les force de mener ; car, en hiver, un homme entre dans une étuve transi de froid, au point de ne sentir ni ses mains ni son visage. Ensuite, lorsqu’il sue, il passera de son poêle à la bise glacée, presque demi-nu. S’il n’a rien à manger, il reste deux ou trois jours à jeun ; et quand les provisions abondent au logis, son ventre ne désemplit jamais. S’il a chaud et soif, l’eau ne sera point assez froide pour lui qu’il ne la mette à la glace ; et comme il ne boit que lorsqu’il est extrêmement altéré, il s’étouffe à force d’eau. Aussi la plupart des maladies, et surtout les points de côté, ne les attaquent guère qu’au cœur de l’hiver, quand ils sont dépourvus de vivres. D’ailleurs on ne peut jamais leur persuader de suer dans ces sortes de fluxions ; au contraire, ils s’efforcent de se rafraîchir en buvant à la glace ; aussi le mal les a promptement emportés.

Crantz place les funérailles après la médecine ; si ce n’est pas l’ordre des matières, c’est du moins l’ordre des choses. Dès qu’un Groënlandais, dit-il, est à l’agonie, on l’arrange dans ses beaux habits et ses bottes, et on lui attache les jambes contre les hanches, sans doute afin que son tombeau soit plus court. Aussitôt qu’il est mort, on jette ce qui touchait à sa personne,