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discours ressemblent à leurs cabanes, et là comme ailleurs, la langue est l’image des mœurs ; ce peuple n’a rien d’élégant. La syntaxe des Groënlandais est simple, et naturelle. Le mot qui désigne l’objet principal est à la tête de la phrase, et les autres mots se placent à la suite, chacun selon le degré d’importance qu’il a dans l’ordre des idées. Quoique les leurs ne soient pas bien élevées ni abstraites, leur manière de construire un mot de pièces de rapport doit mettre quelquefois de la confusion dans leurs phrases : mais ils croient suppléer à la clarté des idées par la répétition des paroles. Leur style n’a point d’hyperbole ni d’emphase comme celui des Orientaux, et même des peuples septentrionaux de l’Amérique. Cependant ils aiment les similitudes et les allégories, surtout depuis qu’ils connaissent l’Évangile. Ils ont aussi des tours figurés, des proverbes ; mais ce langage n’est familier qu’aux devins, qui emploient quelquefois des expressions dans un sens contraire à l’acception reçue ; cet art leur donne l’air savant, et leur sert à expliquer des oracles.

Leur poésie n’a ni rime ni mesure ; elle est pourtant composée de courtes périodes ou phrases qui peuvent se chanter en cadence.

Leur arithmétique est très-bornée : car, quoiqu’ils puissent compter jusqu’à vingt par le nombre des doigts de leurs mains et de leurs pieds, leur langue ne leur fournit de noms de calcul que jusqu’au nombre de cinq ; de sorte qu’ils répètent quatre fois cette nomenclature