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tes idées avec un seul mot. Chaque verbe, pour exprimer différens rapports, soit de temps ou de personnes, lesquels concourent à le modifier, aura jusqu’à cent quatre-vingts inflexions. Dans un seul mot, on exprime à la fois le verbe, le pronom personnel qui lui sert de nominatif, celui qui sert de cas avec la préposition qui désigne ce cas, le nombre singulier, duel, ou pluriel du nominatif et du cas ; le temps qui précède, accompagne, ou suit l’action désignée par le verbe.

Ceux qui ont étudié la langue groënlandaise avec le plus de soin ont découvert cent façons de combiner un mot avec deux, trois, quatre, cinq ou six autres qui n’en feront qu’un seul. On va donner un exemple de ces combinaisons, plutôt pour la curiosité des lecteurs que pour l’instruction des savans.

Aglek-pok, il écrit.

Aglek-iartor-pok, il va écrire incessamment.

Aglek-iartor-asuar-pok, il va se mettre vite à écrire.

Aglek-kig-iartor-asuar-pok, il va se mettre encore promptement à écrire.

Aglek-kig-iartor-asuar-niar-pok, il va se mettre de nouveau promptement, et il est déjà à écrire.

Les Groënlandais coupent et façonnent leurs mots comme on taille la pierre brute ; mais les matériaux de leur langue sont si durs et si raboteux, que l’édifice qu’ils en construisent est toujours informe et mal cimenté. Ainsi leurs