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monte du sein de la terre pour ressusciter le corps de l’inspiré. Cet homme est alors archimagicien.

Un artifice aussi grossier se trahit de lui-même : les missionnaires chrétiens voient la fraude trop à découvert pour soupçonner que le diable y puisse avoir quelque part. Ces devins ne sont pas non plus de purs charlatans ; ce sont ou des gens d’une certaine habileté, ou des enthousiastes dupes de leur imagination, ou des imposteurs effrontés. Parmi ces angekoks il y a des espèces de sages qui ont quelques connaissances de la nature, soit qu’ils les tiennent des leçons de leurs prédécesseurs, ou de leurs propres réflexions : ils jugent assez sûrement du temps favorable ou contraire à la pêche, et savent prédire d’avance au peuple le bonheur ou le malheur qui peut venir des circonstances locales et momentanées de ses entreprises. Avec les malades ils ont une routine assez sûre, ou bien l’art de les flatter et de les amuser par de vaines paroles, ou par des remèdes dont un peu de charlatanerie est le premier ingrédient. Tant qu’ils espèrent les guérir, ils y procèdent par un régime ou une diète qui n’est pas absolument ridicule. Quand le raisonnement et la pratique ont donné un certain crédit, on suit aveuglément leurs conseils. En un mot, les angekoks sont les gens d’esprit, les médecins, les casuistes, les philosophes et les théologiens du Groënland, titres