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et d’égarer les hommes qui vont rejoindre leurs camarades ; mais pourtant ces esprits ne sont point malfaisans. Il y a des génies pour les montagnes ; les uns sont des géans de douze pieds de taille, les autres des pygmées qui n’ont qu’un pied de haut, mais très-ingénieux, dit-on, au Groënland ; car ils ont appris aux Européens tous les arts qu’ils possèdent. Il y a des esprits d’eau douce : ainsi, quand les Groënlandais rencontrent une source ou fontaine inconnue, un angekok, ou, en son absence, le plus ancien de la troupe doit boire le premier de cette eau nouvelle pour la délivrer des esprits malins. Cette engeance est répandue partout : si les femmes qui ont de petits enfans, ou qui sont dans le deuil, tombent malades après avoir mangé de certains mets, elles s’en prennent aux esprits des substances comestibles, qui les ont poussées à passer les bornes et les règles de l’abstinence. Les Groënlandais reconnaissent une sorte de Mars. Il a pour cortége les esprits de la guerre, qui sont ennemis du genre humain, et qui habitent, disent-ils, à l’orient de leur pays ; c’est de là que les Norvégiens abordèrent à la côte orientale du Groënland. Ce pays a son Éole qui préside aux glaces et commande au beau temps. Le soleil et la lune ont aussi leurs esprits tutélaires, qui furent autrefois des hommes, si l’on en croit la vanité du peuple groënlandais, ou plutôt la charlatanerie de ses devins. Ceux-ci font mille contes de spectres et de fantômes, qui semblent