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rée souterrain sur la température des saisons à venir. Sa figure est un problème : les uns disent qu’il n’a point de forme ; d’autres, qu’il est comme un grand ours ; quelques-uns le font de la taille haute d’un homme, avec un seul bras ; quelques autres, aussi petit que le doigt. Il est immortel ; mais il peut être tué, si quelqu’un lâche un vent dans la maison où le magicien l’évoque : cela veut dire qu’il suffit de se moquer des sorciers pour chasser les esprits. Le mauvais principe est un esprit femelle, mais anonyme. C’est, disent les Groënlandais du nord, la fille d’un puissant angekok, qui sépara l’île de Disko du continent, où elle était jointe près de Bals-Fiord, et la poussa deux cents lieues plus loin vers le pôle. Cette Proserpine habite sous la mer, dans un vaste palais, où sa puissance magique enchaîne tous les animaux de l’Océan. Dans la cuve d’huile qui entretient sa lampe nagent tous les oiseaux aquatiques. Les portes de son palais sont gardées par de terribles phoques qui rampent à l’entrée ; mais le seuil en est encore défendu par une espèce de Cerbère qui ne dort que le temps d’un clin d’œil, et ne peut être surpris. Quand les Groënlandais éprouvent la famine sur mer, ils députent et paient un angekok pour aller apaiser la malignité femelle. Son esprit familier le guide à travers le sein des mers et de la terre. Il passe par la région des âmes heureuses qui vivent dans la gloire et les plaisirs ; ensuite il arrive aux bords du vaste abîme, à l’entrée duquel une petite roue,