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des cérémonies et des pratiques religieuses l’idée de Dieu semblait fort loin de leur esprit quand les premiers missionnaires danois sont allés leur parler de l’Être suprême. Le nom de la Divinité n’était pas même dans leur langue. Leur demandait-on qui a fait le ciel et la terre, ils répondaient, Nous n’en savons rien ; ou, Nous ne le connaissons pas ; ou, Ce sera sans doute un être habile et puissant. Ou bien ils disaient : « Les choses ont toujours été ce qu’elles sont, et demeureront dans le même état. » Cependant les missionnaires pensent que ce peuple avait au fond de l’âme une notion obscure de la Divinité ; notion fausse, erronée et ridicule, mais qui prouve toujours, disent-ils, qu’il doit y en avoir une vraie.

« Quant à l’âme, dit Crantz, il y a des Groënlandais qui ne croient pas que dans l’homme elle soit autre chose que dans les animaux, ni qu’elle survive à notre corps. Mais, ajoute-t-il, ceux qui pensent ainsi sont des gens brutaux et stupides, dont le reste de la nation se moque, ou des libertins de mauvaise foi, qui cherchent à tirer du profit de leur doctrine. » Cependant on ne voit pas ce qu’ils peuvent y gagner chez un peuple qui n’a ni riches, ni grands, ni de ces tyrans intéressés à mépriser les remords. D’autres croient que l’âme est un second principe dans l’homme, mais matériel comme le corps, divisible, capable d’acquérir, de perdre et de recouvrer. Ils imaginent même qu’elle quitte le corps, et vit à part ; et cette