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C’est la police d’une société bien imparfaite sans doute ; mais il se commet encore moins d’injustices que dans les états les mieux civilisés, parce qu’il ne se trouve pas tant d’occasions ni de tentations de crime. Au reste, quand on parle aux Groënlandais de ce qu’il peut y avoir de vicieux et de déraisonnable dans leurs usages, ils répondent comme les gens du monde le plus poli : C’est la coutume.

Peut-on dire qu’un peuple qui n’a ni religion, ni gouvernement, ni lois divines, ni lois humaines, ait proprement des vertus ? C’est la question que se fait Crantz. Mais il semble la décider en nous annonçant dans le caractère des Groënlandais des qualités assez louables pour faire rougir même des chrétiens. « Je sais, dit-il qu’on a reproché des vices abominables à ce peuple stupide, et que bien des voyageurs en ont fait le portrait le plus hideux ; mais comme chaque objet a deux faces, j’ai eu le bonheur d’être plus frappé de l’aspect avantageux des mœurs de cette nation que de leur côté le plus défavorable. Cependant j’en rapporterai le bien et le mal avec la fidélité qui convient à tout peintre qui ne veut que rendre ses tableaux ressemblans : et tel est le but et le devoir d’un homme qui raconte ses voyages au public. »

On dit que les Groënlandais sont un peuple sauvage ; mais ce serait se faire une fausse idée de ce terme que d’y attacher celles de l’extravagance et de la cruauté. Ils ne sont à