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ans jusqu’à leur mort, ce n’est qu’un enchaînement de peines, d’indigence et de misère. Si leur père meurt, les voilà sans ressources, obligées d’aller servir pour vivre ; elles ne manqueront pas de subsistances chez un maître, tant qu’il y en aura, mais n’y gagneront pas de quoi s’habiller. N’ont-elles point d’agrément dans la figure, ou d’adresse à l’ouvrage, elles restent seules. Se marient-elles, c’est rarement à leur gré ; toute la première année, elles craignent d’être répudiées s’il ne leur vient point d’enfans. Sont-elles congédiées pour cause de stérilité, c’en est fait de leur réputation, elles n’ont plus qu’à servir ou se prostituer pour gagner leur vie. Si leur mari les garde, il leur faut souffrir et prendre en bonne part sa mauvaise humeur et les querelles d’une belle-mère. S’il vient à mourir, sa veuve n’a d’autre douaire que les hardes qu’elle avait apportées dans la maison, et quand il lui reste des enfans qu’il faut nourrir, elle doit chercher à se mettre en service, à moins qu’elle n’ait un fils ; car alors sa condition de veuve vaudrait mieux que celle d’épouse. Une femme avance-t-elle en âge sans enfans qui puissent lui attirer de la considération, toute sa ressource est le métier de sorcière, dont elle tire quelquefois profit, mais non sans risque d’être lapidée, ou précipitée dans la mer, ou poignardée et mise en pièces sur le moindre soupçon d’avoir ensorcelé quelqu’un. Échappe-t-elle à ces dangers, comme elle n’est qu’un