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mire et loue sa dextérité, vante le goût délicieux de la bête qu’il a tuée ; et dès ce jour de gloire et de triomphe, les femmes songent à trouver une compagne au vainqueur du monstre. Mais si le jeune homme n’avait rien pris, ou n’avait donné aucune preuve de talent, il serait méprisé des hommes, et réduit à subsister de la pêche propre aux femmes, c’est-à-dire de moules, de coquillages, ou de poisson sec. Il y a des jeunes gens qui ne parviennent jamais au mérite de la grande pêche, et ceux-là sont obligés quelquefois de faire chez les autres l’office de servante. À vingt ans, un Groënlandais fait son kaiak et son équipage, et vogue de ses propres rames. Il ne tarde pas alors à se marier ; mais il reste toujours avec ses parens, et sa mère garde le timon du ménage.

Les filles, jusqu’à l’âge de quatorze ans, ne font que babiller, chanter et danser, à moins qu’elles ne servent à puiser de l’eau. À quinze ans, il faut qu’elles sachent soigner quelque enfant, faire la cuisine, préparer les peaux, et même, à mesure qu’elles avancent en âge, ramer sur les bateaux et bâtir les maisons.

Dans le ménage, le mari va sur mer à la chasse, à la pêche ; et dès qu’il est à terre, il ne s’embarrasse plus de rien, croyant même au-dessous de sa dignité de tirer à bord l’animal qu’il a pris. Les femmes font tout le reste, depuis le métier de bouchères jusqu’à celui de cordonnières. Elles n’ont pour toutes sortes