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les enfans approchent de l’âge de la raison, et que la leur est plus développée par des occupations utiles et sérieuses, ils deviennent plus faciles à gouverner. On remarque en eux peu de mauvais naturel, de penchans vicieux, et surtout de fausseté ; mais ils aiment à obéir par inclination, et que leurs parens les traitent en amis : s’ils n’ont pas envie de faire ce qu’on leur demande, ils diront sans compliment, je ne veux pas. Les parens oublient ce refus jusqu’à ce que les enfans reconnaissent d’eux-mêmes leur tort. En récompense de tant de douceur, un père n’éprouve jamais dans sa vieillesse l’ingratitude de ses enfans : les mœurs de ce peuple sont à cet égard la censure, ou du moins le contraste des nôtres.

Chez les Groënlandais, aussitôt qu’un enfant peut faire usage de ses mains et de ses pieds, son père lui donne un arc et des flèches pour qu’il s’exerce à tirer au blanc. Il lui apprend à lancer des pierres contre un but planté sur le bord de la mer ; il lui fait présent d’un couteau, qui sert d’abord à son amusement. À l’âge de dix ans, il le pourvoit d’un kaiak, où il se divertit à ramer, à chasser et à pêcher, à tenter enfin les travaux et les périls de la mer. À quinze ou seize ans, l’enfant suit son père à la pêche du phoque. Le premier monstre qu’il a pris doit servir à régaler toute sa famille et le voisinage. Durant ce festin, le jeune homme raconte son exploit, et comment il s’est rendu maître de sa proie. Tout le monde ad-