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que les maisons s’en ébranlent et se fendent ; les tentes et les bateaux en sont emportés dans les airs, et les flots de la mer balayés et dispersés en pluies sur les terres. Les Groënlandais assurent même que les ouragans ont souvent roulé dans l’air et mis en pièces des pierres qui pesaient deux livres. Quand ils veulent sortir pour mettre leurs canots à l’abri, ils sont obligés de ramper sur le ventre, de peur d’être le jouet des vents. En été, on voit s’élever de semblables tourbillons, qui bouleversent les flots de la mer, et font pirouetter les bateaux. Les plus furieuses tempêtes viennent du sud, tournent au nord, s’y calment, et finissent par épurer les eaux. C’est alors que la glace des baies est enlevée de son lit et se disperse sur la mer en monceaux. Ces tempêtes sont annoncées d’avance par un cercle qui se forme autour de la lune, et par des rayons de diverses couleurs qui brillent dans les airs.

Quelquefois il s’élève des nuages orageux d’où sortent des éclairs ; rarement sont-ils accompagnés de tonnerre : et lorsqu’on l’entend par hasard, on ne peut discerner au bruit si c’est réellement la foudre qui gronde ou la glace qui se brise, ou des pierres qui roulent d’un rocher. On ne voit guère non plus dans le Groënland de tremblemens de terre ni de volcans, quoiqu’il soit voisin de l’Islande, où ils sont si communs. On n’y trouve pas même de pierres de soufre. Ainsi la nature économise ses fléaux comme ses bienfaits, épar-