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tôt hérissés de bruine et de glaçons ; mais aussi cette fumée cause plutôt des engelures qu’un froid sec ; et dès qu’elle passé de la mer dans une atmosphère plus froide, elle se change en une espèce de verglas que le vent disperse dans l’horizon, et qui cause un froid si piquant, qu’on ne peut sortir au grand air sans risquer d’avoir les mains ou les pieds entièrement gelés. C’est dans cette saison qu’on voit l’eau glacer sur le feu avant de bouillir ; c’est alors que l’hiver pave un chemin de glace sur la mer, entre les îles voisines, et dans les baies et les détroits ; c’est alors que les Groënlandais meurent souvent de faim, ne pouvant aller dehors pour la chasse ou pour la pêche, ni pour se procurer la moindre nourriture ; et quand ils sortiraient, où en trouveraient-ils ?

Un hiver si rigoureux est toujours bien long ; cependant ce peuple compte son été depuis le commencement de mai jusqu’à la fin de septembre ; car, durant les cinq mois de cet intervalle, il campe dans des tentes. Mais la terre n’est bien amollie et détrempée par le dégel qu’au mois de juin, encore n’est-ce qu’à la surface ; il ne laisse pas de neiger jusqu’au solstice d’été. La neige reprend au mois d’août, mais ne s’empare des campagnes qu’en octobre. On dit pourtant qu’il tombe moins de pluie et de neige dans le Groënland qu’en Norwége. Rarement voit-on la neige sur les bords de la mer au-dessus d’un pied de profondeur, si ce n’est dans les endroits où le vent en fait des