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les côtes plates, jusqu’à ce que le soleil les ait insensiblement fondues, ou que le flux, les tempêtes et les courans les aient enlevées des bords de la côte pour les entraîner à la mer.

Il y a des glaces qui s’épaississent entre les rochers jusqu’à les surpasser de leur propre cime : elles sont bleues, percées de fentes et de cavités, sillonnées par les torrens de pluie, et couvertes de neiges qui, dans une continuelle alternative de fontes et de gelées, s’élèvent d’année en année à une hauteur prodigieuse. Elles sont d’une nature plus solide que les glaces flottantes, et ne sont pas moins curieuses par leurs décorations. On y voit comme des arbres avec leurs branches et des flocons de neige à la place des feuilles : ici ce sont des colonnades et des arcs de triomphe ; là des portiques et des façades avec des fenêtres ; et les rayons de lumière azurée qui sortent du fond de ces miroirs naturels réfléchissent au-dehors comme des images de gloire céleste.

Il est difficile d’expliquer comment se forment et d’où viennent ces énormes montagnes de glace qu’on voit flotter sur une immense étendue de mer. Les uns disent qu’elles naissent de la mer elle-même qui se gèle jusqu’au fond dans les baies, d’où elles sont détachées par les fontes de neige qui débordent au printemps, puis grossies par les brouillards et les pluies qui se congèlent, enfin emportées par les vents dans le grand Océan. Mais, outre