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seille à personne de suivre cette route. « Ce n’est pas, dit-il, qu’on n’en puisse traverser les glaces à pied avec un canot sur la tête, soit en descendant de petits vallons de quatre ou cinq brasses, soit en sautant d’un sommet de glace à l’autre, comme je l’ai fait avec quelques Groënlandais, nous appuyant sur des perches ou sur le canon de nos fusils, que nous avions apportés pour vivre de notre chasse. À la vérité l’on trouve quelquefois dans ces glaces des trous qui n’ont pas de fond, mais ils ne sont pas larges, ou l’on peut en faire le tour. Les plus grands inconvéniens sont l’impossibilité qu’un homme apporte les provisions de vivres nécessaires pour un si long voyage, et la difficulté de respirer au milieu de ces glaces, où l’on est obligé de passer les nuits sans tente ni toit d’aucune espèce ; car, quoique nous eussions la précaution de ne point dormir sur la glace ou la neige, cependant, malgré les peaux d’ours et de rennes, malgré les fourrures et les habits chauds dont nous étions garnis, à peine avais-je pris une heure de repos que je me sentais tout le corps gelé ; de sorte que je n’ai jamais éprouvé tant de froid en plein air, dans le cœur de l’hiver le plus rigoureux du Groënland, que j’en avais sur le détroit de Frobisher aux premiers jours de septembre. »

Au-dessus de ce détroit s’élève ce sommet qu’on appelle Isblink, et dont le voyageur que nous venons de citer a déjà parlé. C’est une grande montagne de glace, dont la cime