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bâillon attaché par les deux bouts avec une corde qui se lie derrière la tête. Un esclave du roi, qui reçoit pour son salaire huit écus en poudre d’or, portant sur la tête un des fétiches du roi, court dans toutes les rues de la ville comme un insensé, en faisant pencher le fétiche de côté et d’autre comme s’il voulait le faire tomber. Lorsqu’il arrive à la place où l’on a déjà conduit le criminel, il perce la foule en demandant au fétiche sur qui doit tomber la fonction d’exécuteur. Ensuite le premier jeune homme qu’il touche de l’épaule est celui qu’on suppose nommé par le fétiche. Cependant il recommence à demander si c’est assez d’un seul. Quelquefois le nombre des exécuteurs nommés monte ainsi jusqu’à dix. Enfin l’esclave fugitif est placé près du fétiche auquel il doit être sacrifié. On prend le soin de lui faire étendre le cou au-dessus de l’idole. Celui qui se trouve nommé le premier pour l’exécution tire son poignard et lui perce la gorge, tandis que les autres tiennent la victime, dont ils font couler le sang sur le fétiche. L’exécuteur accompagne cette action d’une prière qu’il prononce à haute voix : « Ô fétiche ! nous t’offrons le sang de cet esclave. » Aussitôt qu’il est mort on coupe son corps en pièces, et l’on ouvre au pied du fétiche un trou dans lequel toutes les parties sont enterrées, à l’exception de la mâchoire, qu’on attache au fétiche même. Les exécuteurs sont censés impurs pendant trois jours, et se bâtissent une cabane séparée